Historique

DES JARDINS AUX PORTES DE LA VILLE…

Le coeur historique de Nantes est le résultat d’une histoire urbaine particulièrement riche dont les origines gallo-romaines et médiévales se situent au point de confluence entre l’Erdre et la Loire, globalement à l’Est de l’actuel cours des 50 Otages.

Les secteurs «hors les murs» de l’enceinte médiévale se développent essentiellement dans la première moitié du XVIIIe siècle : le long des axes menant aux portes de ville et le coteau longeant le quai de la Fosse.

La partie Ouest en arrière du coteau de la Fosse est à cette époque encore très rurale, occupée par des jardins et vergers clos appartenant à des communautés religieuses (Le Calvaire, Les Capucins), des tenues maraîchères (La Cagassaie, Bouvet) et de grands établissements (La Grande Corderie, la manufacture de cotonnade, la Verrerie). Plus à l’Ouest, se trouve l’Hôpital Général (Le Sanitat) sur lequel sera construit, au milieu du XIXe siècle, l’église Notre-Dame-du-Bon-Port. Plusieurs rues en pente permettent de relier ce secteur au port et au faubourg de la Fosse et bientôt à la Bourse de commerce, première institution construite hors les murs.

Extrait du Plan de Nantes avec les changements et augmentations qu’on y a fait depuis 1757, par Lerouge, 1766. / Archives Municipales de Nantes, Cote 1 Fi 40

 

…À LA CRÉATION D’UN QUARTIER

La transformation du quartier s’annonce avec les ambitions de Gérard Mellier sur l’embellissement de la ville : démolition des fortifications, création de promenades et mise en oeuvre de lotissements ordonnancés (dont l’île Feydeau et le Cours Saint-Pierre constituent les premiers exemples).

En 1766, l’architecte-voyer de la Ville, J-B. Ceineray, préconise de créer une place Royale à la place des ouvrages défensifs de la porte Saint-Nicolas, dans le cadre d’une recomposition urbaine aux abords de Saint-Nicolas (projet d’église plus vaste). La réflexion reste pour le moment sur les abords directs des limites de l’enceinte.

Quelques années plus tard, c’est tout un projet d’urbanisme pour un nouveau quartier qui se dessine, reliant l’Hôpital Général à l’ancienne porte St-Nicolas (cf. page précédente). Cette idée de développer une véritable extension de la ville vers l’Ouest (et donc vers le port) est alors portée par Jean-Joseph-Louis Graslin, receveur des Fermes du roi et habitant du quartier, qui va initier ici une vaste opération spéculative avec le concours de la municipalité. Si les premières esquisses sont pensées par J.B Ceineray, c’est son successeur, Mathurin Crucy, qui va en être le principal maître d’oeuvre.

Graslin se porte acquéreur de la tenue de Bouvet en 1777, suivie de la tenue de la Cagassaie en 1778 et divers autres terrains de culture maraîchère. L’enclos des pères Capucins installés ici depuis 1629 sépare ces terrains de la Fosse et leur acquisition reste infructueuse jusqu’à La Révolution.

En attendant, le projet se dessine et prend forme. Il est adopté par la municipalité en septembre 1780, sur la base d’un plan de 1779 prévoyant une place ovale -dont la
forme évoluera- rayonnant en six rues. Graslin voit l’opportunité de doter son nouveau quartier de plusieurs édifices publics : un théâtre, une bourse, une nouvelle église (St-Nicolas).

En 1787, après la cession d’une petite part de l’enclos des Capucins à la Ville, Crucy et Demolon père reprennent le dessin de la place en adjoignant au rectangle initialement prévu un petit hémicycle tangent à la propriété des religieux, signant là le plan définitif de la place Graslin.

Enclos des Capucins et projet de place Graslin / Archives Départementales C336/4

LA MISE EN OEUVRE PROGRESSIVE DE LA PROMENADE

Avec la nationalisation des biens religieux, l’enclos des Capucins est démantelé. Graslin n’étant plus en vie, la Ville se porte acquéreur de la totalité des terrains, pour les revendre par lots,tout en conservant la partie destinée à la promenade publique. La vente a lieu fin 1791-début 1792 et comporte 26 ou 27 lots.

L’architecture des façades est imposée le long de la promenade, le cahier des charges rédigé a été conservé mais les pièces graphiques qui l’accompagnent n’existent pas dans les archives. Le délai de 3 ans imposé pour édifier les immeubles n’a pu être respecté, les constructions s’étalèrent jusqu’en 1838. Une façade aveugle doit même finalement être édifiée pour fermer la perspective en l’absence de construction sur l’un des terrains (20 rue de l’Héronnière).

Les travaux d’excavation et d’aménagement de la promenade se déroulent sous la direction de M. Peccot et les premiers arbres (double rangée d’ormeaux) sont plantés en 1811. Le Cours, qui devait recevoir selon les plans de Crucy une statue d’Henri IV, fait environ 170 mètres de long par 47 de large.

Le Cours dénommé «cours de la République» sur l’acte officialisant la vente des lots prendra le nom de «cours Napoléon» en 1811, puis «cours Henri IV» en 1812 avant de retrouver le nom «cours Napoléon» en 1848 (date à laquelle il reçoit la statue du général Cambronne en 1848). Il apparaît sous le nom de «cours de la République» sur le plan Demoget de 1877 et ce jusqu’en 1936.

GÉOMÉTRIE D’UN ESPACE URBAIN

La promenade a été originellement pensée comme un espace de mise en scène pour un édifice public, à l’image de la place Graslin centrée sur sa salle de spectacle.

Cadastre napoléonien en ligne, section S3, 1834. / AD44 7P4344F054

Graslin avait déjà imaginé un palais de la bourse, dont on connaît le projet dessiné par Seheult en 1786 (cf. page précédente). Mathurin Crucy, quant à lui, propose de placer, à l’extrémité du cours, un «palais de souverain» associé à un musée de peinture et de sculpture, dont le dessin est conservé aux Archives municipales. Le projet évolua ensuite vers un nouvel Hôtel des Monnaies disposé sur les terrains vierges face au cours (cf. cadastre napoléonien ci-contre). En 1824, c’est encore Crucy qui présente un nouveau projet lui aussi abandonné, un muséum.

Extrait du Plan de Nantes, par Jouanne, 1910 / Archives municipales de Nantes, Cote 1 Fi 525

En 1840, la Municipalité décide finalement de percer l’actuelle rue Maurice Sibille (autrefois rue Cambronne) pour la lotir. Celle-ci ne sera prolongée jusqu’à la Loire (place du Commandant L’Herminier) que dans le cadre du Plan de Reconstruction de 1945-48, suite aux sinistres des bombardements.

Extrait du Plan des Immeubles sinistrés par les bombardements, par le service Municipal, 1944. / Archives municipales de Nantes, Cote 1 Fi 1564

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